Au large des côtes françaises, de gigantesques éoliennes émergent lentement de l’horizon. Elles ne sont pas ancrées au fond de la mer comme leurs prédécesseurs : elles flottent. C’est une révolution silencieuse, mais déterminante, qui se joue dans les eaux de la Méditerranée et de l’Atlantique. La France, longtemps en retrait dans le domaine de l’énergie éolienne offshore, veut aujourd’hui rattraper son retard avec une approche audacieuse : des fermes éoliennes flottantes capables de capter les vents les plus puissants, loin des côtes.
Le principe des éoliennes flottantes
Contrairement aux éoliennes fixes, installées sur des socles massifs ancrés dans les fonds marins, les éoliennes flottantes reposent sur une plateforme stabilisée par des câbles et des ancres. Cette technologie permet d’installer des turbines dans des zones où la profondeur dépasse 50 ou 60 mètres, là où les vents sont plus réguliers et plus forts. Résultat : un rendement supérieur et une empreinte écologique réduite sur les fonds marins.
Les ingénieurs français ont misé sur plusieurs modèles de structures flottantes — certaines en forme de bouée, d’autres reposant sur des flotteurs triangulaires — capables de résister à des vagues de plus de dix mètres. Ces plateformes doivent être à la fois légères, stables et capables de supporter des turbines de plus de 200 mètres de haut.
Les pionniers de la Méditerranée
La région d’Occitanie, avec le projet EolMed au large de Gruissan, fait partie des pionnières. Ce site expérimental réunit plusieurs turbines flottantes d’une capacité totale de 30 mégawatts. L’objectif : tester la résistance des structures, leur intégration au réseau électrique et leur impact sur l’environnement marin.
Sur la façade atlantique, d’autres projets comme Provence Grand Large et Groix & Belle-Île visent à démontrer la faisabilité industrielle de cette technologie. Ces projets sont soutenus par l’État français dans le cadre de la stratégie nationale pour l’énergie renouvelable, qui prévoit d’ici 2050 que plus de 40 % de l’électricité provienne de sources décarbonées hors nucléaire.
Un enjeu industriel et stratégique
L’éolien flottant n’est pas seulement une prouesse technique : c’est aussi une bataille économique. La France, dotée du deuxième espace maritime mondial, a un atout majeur à faire valoir. Les ports de Brest, Saint-Nazaire, Fos-sur-Mer et Port-la-Nouvelle se transforment peu à peu en hubs industriels pour accueillir la construction et la maintenance des futures éoliennes.
Des dizaines d’entreprises françaises, du génie maritime à la fabrication de câbles sous-marins, participent à cette nouvelle filière. Elle promet des milliers d’emplois qualifiés dans la transition énergétique et l’ingénierie navale.